Ainsi, la gouverneure du Mandoul, Mme Diamra Bétolngar et des représentants de communautés ont conclu vendredi dernier un accord portant «réparation civile» en cas d’homicide entre les ressortissants de différentes communautés. Ledit accord prévoit une indemnisation de 1,5 millions de francs Cfa en cas d’homicide volontaire et 1 million en cas d’accident. Ladite indemnisation n’exclut pas l’action pénale précise le texte.
Tollé au sein de la communauté des originaires du Mandoul rejoints par d’autres qui dénoncent une imposition d’une règle islamique dans des contrées où on ne consomme pas le prix du sang: la diya. Très vite, le débat a pris des allures d’affrontements chrétiens/musulmans sur les réseaux sociaux ravivant au passage le débat nord-sud.
Pendant ce temps, la gouverneure et le représentant des chefs traditionnels du terroir sont voués aux gémonies alors que des associations et regroupements d’avocats dénoncent l’accord à qui ils promettent une fin certaine. Surtout rappellent-ils que cet arrangement mortifère a été décrié par le défunt président au cours de la 4ème conférence des gouverneurs à Abéché en octobre 2019. S’en est suivi une circulaire signée par trois ministres (défense, sécurité, justice) qui note que «cette conception erronée de la diya est contraire aux textes en vigueur et encourage l’impunité».
Mais jusqu’où ira cette vague d’indignation ? Au simple remplacement de la gouverneure ou à l’annulation du texte contesté ? Pourtant, le Mandoul qui a donné au Tchad indépendant son premier président et de centaines de hauts cadres n’en est pas à sa première humiliation. C’est de cette vallée qu’affluent chaque année des dizaines de jeunes «vendus» pour des croutons de pains à des éleveurs pour servir de bouviers. Le phénomène dure depuis deux décennies et au-delà des foras, les enfants du Mandoul n’ont pas pu l’endiguer. Le Mandoul est, avec quelques autres provinces, la partie du territoire où l’accaparement des terres voire des sites sacrés est à l’ordre du jour depuis plusieurs années. La pression foncière provoque des heurts avec morts d’hommes. Face à une justice inefficace, les autochtones se contentent d’arrangement en attendant que les politiques viennent leur expliquer que selon la constitution, chaque tchadien a le droit de s’établir sur n’importe quelle partie du territoire. Bel euphémisme !
Ce que les ressortissants du Mandoul et partant le reste des Tchadiens doit exiger, ce n’est pas seulement des mesures dans l’urgence, de la cosmétique. L’impunité est la conséquence de l’injustice qui elle, est le fait d’un pouvoir judiciaire inefficace soit du fait des praticiens, soit du fait de l’exécutif qui, dans notre système administratif, régente le judiciaire. Ils en ont la capacité et les moyens s’ils veulent qu’enfin, leur si belle vallée cesse d’être ce qu’un des leurs a surnommé le Kemndoul.
La Rédaction