L’éditorial du numéro 110
Etre du bon côté de l’histoire
« Le deuxième nom de Dieu, c’est le temps ». Le dicton ivoirien a eu tout son sens ce 15 janvier 2019 avec l’acquittement de l’ancien président ivoirien, Laurent Koudou Gbagbo et son filleul, Charles Blé Goudé. L’accusation de la cour pénale internationale s’est montré « incapable » de prouver que les deux politiciens ivoiriens se sont rendus coupables de crimes de guerre et de crime contre l’humanité ont estimé les juges.
Au-delà du camouflet et du débat sur l’opportunité d’une justice supranationale dans la configuration de la Cour pénale internationale (Cpi), l’histoire a su donner raison à l’ancien professeur d’histoire, devenu chef d’Etat. Ce qui s’est passé en 2011 en Côte d’Ivoire était clairement un coup d’Etat orchestré par la France avec la bénédiction de la communauté internationale contre un régime qui, assurément n’était pas du goût des puissances. Après avoir installé Alassane Ouattara au pouvoir, il fallait éloigner le populaire Laurent Gbagbo et son protégé Blé Goudé pour laisser le nouveau pouvoir gouverner tranquillement. C’est ce qui fut fait et la troublante coïncidence entre le verdict de la Cpi et les grandes manœuvres préélectorales en Côte d’Ivoire avec le retrait annoncé de Alassane Ouattara en disent long.
Mais l’histoire retiendra de Laurent Gbagbo qu’il a su mettre en avant les intérêts des Ivoiriens au détriment des puissances. Aujourd’hui, l’enfant de Gagnoa est « libre pour la vérité et la justice » allusion au titre du livre qu’il a commis à la fin de l’année 2018 et son parcours devrait nous inspirer.
Exemple de courage et d’engagement, le leader ivoirien a su résister dans la galère et l’indigence aux sirènes de la corruption face à la puissante machine politique que représentait Houphouët Boigny, le père de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Devenu chef d’Etat, il a su résister à une communauté internationale, pilotée par les puissances de l’argent qui gouttait peu la présence d’un socialiste tropicalisé au pouvoir sur les rives de la lagune Ebrié.
Ce que devraient retenir ceux qui aspirent à marquer l’histoire de leur pays dans la durée, c’est que l’engagement politique est une course de fond. C’est pourquoi, savoir se ménager en gardant les yeux sur son objectif est une vertu à cultiver.
Dans une société marquée par le consumérisme et la recherche du gain immédiat et facile comme la nôtre, ce qui s’est passé à la Haye doit interpeller et inviter à la méditation notamment la jeunesse. S’engager pour son pays, c’est défendre l’intérêt général et la justice et non devenir le laudateur d’un pouvoir qui ne se soucie pas que les écoles et universités soient fermées pendant plusieurs mois, que les indicateurs de santé, de développement humains soient au plus bas. S’opposer à un tel régime, c’est se mettre du bon côté de l’histoire. C’est la leçon politique de ce 15 janvier 2018.
La Rédaction