Edito

Edito du 0015

Instaurer (restaurer) la République

Ce qui s’est passé le 14 mai, puis le 4 juin à Mao, même s’il n’a connu que très peu d’écho, est le signe qu’un profond malaise traverse la société tchadienne. Des originaires du Kanem qui empêchent la tenue du concours d’entrée à la police nationale parce que sur la liste des candidats figurent des compatriotes venant d’autres région que celle du Kanem. Malgré l’intervention des forces de l’ordre, les deux tentatives pour organiser les épreuves dans cette partie du pays ont échoué.

Les autorités qui entendent faire une troisième tentative expliquent qu’il s’agit d’une mauvaise interprétation de l’esprit de l’arrêté instaurant le concours d’entrée à la police nationale. Rien ne dit à l’heure où nous écrivons ces lignes que cette tentative ne sera la bonne. Surtout que la décision de recruter par quota et par région a pour objectif de faire du corps de la police nationale un bouillon de toutes les sensibilités nationales. Mais tel que le concours s’est passé, il s’est plutôt agi des compatriotes qui se trouvaient dans cette région et non pas seulement les originaires.  Et c’est là où la réaction des compatriotes originaires du Kanem n’est pas républicain.

Cet accès xénophobe de la part d’un peuple, connu pour son pacifisme et son hospitalité mérite explication. Il doit, à notre avis, ne pas être bien loin de la politique qui ne se conjugue sous nos latitudes par la seule posture de diviser pour mieux régner.

Au-delà du Kanem, cette poussée régionaliste doit être interprétée comme un échec de la République. La constitution permet aux citoyens de s’installer et vivre sur n’importe quelle partie du territoire pourvu que cela se passe dans le respect des us et coutumes dudit terroir.

Or, les multiples conflits éleveurs-agriculteurs, les tueries autour des champs ou des puits qui perdurent depuis des décennies ne sont que les conséquences d’une incurie dans la gestion de ces crises. Souvent, l’on a favorisé les traditions et normes locales au détriment de celles de la République. Cette complaisance, même si on l’a voulu pédagogique n’a été que contre-productive et a sapé les fondements de la République. 

Il est du devoir de l’autorité d’imposer et d’expliquer que les Tchadiens sont tous égaux en droits et devoirs. Ne pas le faire, c’est contribuer à briser le sentiment d’appartenir à un même ensemble qui est le Tchad.  

La Rédaction