Pahimi n’est pas le problème
La crise sociale vient d’entrer dans la troisième semaine. Trois semaines sans écoles et bientôt une semaine que les hôpitaux publics sont sans service minimum. Dans un élan de compassion, le personnel sanitaire, qui a au passage rejeté les réquisitions opérées par le ministère de tutelle, autorisé à certains médecins de services névralgiques comme les dyalises, les antirétroviraux à assurer le fonctionnement de leurs services dont dépendent des vies.
En face, l’exécutif multiplie les manœuvres allant de la menace à la tentative de corruption sans pour autant faire baisser la température qui monte crescendo. La colère est là et ne cherche que la moindre occasion pour s’exprimer. En témoigne, le tintamarre de sifflets universitaires et casseroles qui ont réveillé plusieurs compatriotes ces derniers jours. Dans des villes comme N’Djaména, la colère est sortie des maisons pour se porter dans la rue dans une sorte de guérilla urbaine pas très organisée. Insidieusement, la machine de répression s’est mise en marche obligeant ceux qui ont osé (Ray’s Kim, Miarim Dillah Evariste) à se cacher au risque de connaître le même sort que ce militant de l’opposition de Doba, tiré de son sommeil parce que soupçonné d’être l’instigateur des troubles dans la ville.
C’est dans ce contexte que les leaders des trois principaux groupes religieux (musulmans, catholiques, protestants) ont entrepris une médiation entre gouvernement et syndicats sans arriver, au moment où nous mettons sous presse, à une solution tangible.
C’est aussi dans ce contexte que des voix s’élèvent pour réclamer la démission du gouvernement principalement le Premier Ministre à qui on veut faire porter la responsabilité d’une crise qui est plus profonde qu’on ne le veille le faire croire. Que les choses soient claires, l’objet n’est pas de faire, ici l’avocat du gouvernement qui s’est rendu coupable de mesures impopulaires qu’il assume d’ailleurs très bien au passage. Mais réclamer sa démission comme une panacée au problème revient à mal poser le débat, voire tomber dans le piège d’une certaine classe politique qui cherche, dans la crise actuelle à jouer aux pêcheurs en eaux troubles. Nommer un nouveau Premier ministre n’aura pour effet immédiat qu’une relative trêve qui sera rapidement rompue parce que les équations n’auront pas changé.
La crise que vit le pays est une crise de gouvernance et le chef de l’exécutif depuis un quart de siècle est le chef de l’Etat. Il est vrai qu’un Premier ministre est un fusible mais on ne doit pas oublier que griller un fusible ne résoudra aucun problème, si ce n’est le remettre à plus tard.
C’est le chef de l’Etat, aphone depuis que la rue tonne, qui a déjà effectué cinq voyages depuis le début de l’année que doivent s’adresser les plaintes et récriminations. Ce sont ses choix et son programme qui sont exécutés et en cas de crise, c’est à lui qu’il faut s’adresser.
S’adresser à lui pour obtenir l’arrêt de la marche forcée vers la réforme des institutions et de la constitution mais surtout sauver ce qui peut l’être encore en matière de bonne gouvernance. C’est le combat de votre hebdomadaire qui entre à partir de ce numéro à sa troisième année.
La Rédaction