Politique

Grève des magistrats : Djimrabaye Bourngar s’adresse au ministre de la justice

Grève des magistrats : Djimrabaye Bourngar s’adresse au ministre de la justice 1

Dans une lettre ouverte adressée au ministre de la justice, le magistrat et homme de lettre, Djimrabaye Bourngar, a partagé ses préoccupations à propos de la crise qui secoue et affecte actuellement le secteur de la justice que dirige Mahamat Ahmat Alhabo.

« C’est en magistrat libre, non-syndiqué, que je m’adresse à vous », precise Djimrabaye Bourngar avant de relever ses premières interrogations. « La toute première question qui me taraude l’esprit est celle de savoir quelle est l’Autorité qui gère la crise sociale en cours dans votre Maison ? Je me pose cette question parce que j’ai l’impression que tout le monde minimise cette crise et s’en moque, à commencer par vous-même, le premier concerné. Le Premier Ministre s’en moque. Le Conseil supérieur de la magistrature (Csm) et son Président s’en moquent. Quelle image offrez-vous au monde de vous-mêmes, de votre Gouvernement et de votre Pays, quant à vos compétences de gérer une crise aussi profonde, touchant une institution aussi sérieuse et un département aussi sérieux par la désinvolture et par l’indélicatesse ? », s’interroge-t-il.

Djimrabaye Bourngar estime que la communication, tout comme la gestion de cette crise, semble échapper au ministre de justice. « Qui gère cette crise ? Est-ce vous ? Est-ce le Chef du Gouvernement ? Est-ce le Chef de l’Etat ? Sans nul doute, c’est vous, Garde des Sceaux, le premier concerné et le premier responsable de cette crise. Mais si jamais, le Premier Ministre, votre chef hiérarchique, s’y mêle, comme il l’a fait récemment en recevant des responsables des deux Syndicats et en posant des actes, cela signifie tout simplement que la crise a dépassé vos compétences et que vous en êtes dessaisi. Et si le Chef de l’Etat s’y mêle, comme il est en passe de le faire, c’est que vous et le Chef du Gouvernement en êtes dessaisis, parce que dépassés. Et c’est regrettable qu’une telle crise dépasse le chef de famille que vous êtes », poursuit-il.

« Je m’en voudrais de vous demander après tout, si, aux yeux des plus hautes autorités, de vos collègues et de l’opinion, c’est vous qui ne méritez pas d’être respecté au point qu’on vous confie un département qui ne mérite aucun respect de votre part ? Je crains bien qu’ils ne retiennent qu’en réalité c’est vous qui ne méritez pas leur respect parce qu’incapable de régler en bon père de famille une crise qui ne mérite pas toute cette popularité impopulaire. Vous ne communiquez avec les magistrats que par médias interposés. Vous ne communiquez que pour cracher sur ceux dont vous avez curieusement la charge et la dignité ! Je vous ai entendu qualifier les revendications des magistrats de politiques, avouant ainsi que les questions politiques ne seraient pas de votre compétence ! A supposer que ces revendications soient de nature politique, qui mieux que vous, homme politique érudit, est bien outillé pour résoudre une crise politique ? Je suis surpris que ce soit aujourd’hui seulement que vous apprenez que la justice de votre pays est politisée ! » s’adresse-t-il au ministre de la justice.

Pour Djimrabaye Bourngar, si cette crise perdurer, c’est parce que Mahamat Ahmat Alhabo ne travaille qu’à déconstruire, à détruire et à déconsidérer la magistrature et les magistrats. Il se demande comment le Garde des sceaux est arrivé à ne servir que votre propre égo et à asservir les magistrats ?

Le magistrat appelle le ministre à démissionner. « Si jamais, du haut de votre imperium, vous avez de bonnes raisons de penser et de croire que les magistrats ne méritent à vos yeux plus aucune considération, ayez la retenue de retrouver votre propre respect, votre humilité et dignité et de démissionner de votre poste, comme vous l’aviez courageusement fait en 2001, même ce n’était pas pour les mêmes raisons. L’humilité, l’humanité et le respect, c’est tout ce qui manque pour que cette crise trouve solution. Mais d’aventure vous vous y accrochez, comme je vous en exhorte, évitez à tout prix que cette crise trouve solution en dehors de vous, comme pour les crises passées. La seule voie indiquée qui peut amener les magistrats à revoir leur copie est de s’asseoir et discuter avec eux dans l’humilité, dans la lucidité, dans le respect et dans la dignité », souligne Djimrabaye Bourngar qui dénonce les manœuvres orchestrées pour diviser les magistrats et casser leur lutte. Il réitère son soutien aux magistrats et la leur lutte si juste et si difficile. «Comme toujours, ma place est aux côtés de ceux qui subissent l’histoire et non aux côtés de ceux qui écrivent l’histoire qu’avec des histoires. Ma place est aux côtés de ceux luttent », réaffirme Djimrabaye Bourngar.

Nadjita Namlengar