Le timing n’est pas fortuit. Coup sur coup, le parlement européen et la commission des affaires étrangères du Senat américain ont pondu à moins de 24 heures d’intervalles deux déclarations sur la situation du Tchad qui tombent comme une douche froide sur l’opération de communication qu’est devenue la participation du président de transition au sommet Usa-Afrique. Hormis la poignée de main avec le président Biden et la présence de Mahamat Idriss Déby sur la photo de famille, on a dû mal à cerner le gain, pour le Tchad de ce voyage que d’aucuns annoncent comme onéreux pour le trésor public. Le Sénégal, le Benin ou encore le Niger voisin s’en tirent avec des chèques qui pour développer l’agriculture, qui pour construire des infrastructures. Le Tchad lui s’en tire avec une déconvenue qui était somme toute prévisible.
Dans sa missive adressée directement au président de transition via l’Ambassadeur du Tchad à Washington, Bob Menendez qui n’est pas à sa première sortie sur la situation au Tchad appelle à faire la lumière sur le « jeudi sanglant ». Sans récuser l’enquête internationale annoncée par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, le sénateur demande que lui soient associée des experts des Nations-Unies et du bureau du procureur de la Cour Pénale Internationale pour lui donner la crédibilité nécessaire, vu la gravité des crimes annoncés depuis le 20 octobre. C’est dire ce que pensent la communauté internationale de la Ceeac…
Le parlement européen lui aussi ne dit pas autre chose. Dans une déclaration publiée le même jour, les députés européens passent en revue les ratés de la transition, la nécessité d’ajouter d’autres organisations, plus crédibles à l’enquête internationale annoncée par la Communauté Économique Des États De l’Afrique Centrale (Ceeac) avant d’inviter à un retour aux promesses initiales à savoir, la non-candidature des dirigeants de la transition aux prochaines élections et le retour à un pouvoir civil. Sans quoi, il faut passer aux sanctions.
Mais le pouvoir qui interprète mal la finesse du jeu diplomatique croit que le fait d’avoir été invité au sommet Usa-Afrique contrairement aux régimes de transition malien et burkinabé lui donne une certaine légitimé. Mahamat Idriss Déby Itno a-t-il compris, perçu (il n’est pas anglophone) certaines interrogations sur la situation du Tchad ? Lorsque le président de la Banque Mondiale, David Malpass, pas connu pour des prises de position politique sur la situation politique des pays membres dit s’interroger sur le sort de la population avant de rappeler accessoirement la nécessité de restructurer la dette du Tchad, cela doit emmener à réfléchir…
Pour le Tchad, les semaines à venir ne s’annoncent pas sous des auspices favorables. Entre sanctions ciblées, probables plaintes pour crimes de guerre, les apparences d’une transition tranquille vont bientôt se craqueler…
La Rédaction