C’est sans doute, d’un point de vue de l’observateur, la plus malheureuse des phrases sorties de la bouche du chef de l’Etat pendant les cinq jours qui l’ont conduit de Bongor à Sarh, promettant ici, annonçant par là des bienfaits avec l’argent des partenaires au développement (Lire P3). «D’ici le 30 novembre, nous allons interdire l’importation des tissus». Ceci pour protéger le nouveau joyau industriel, la nouvelle société nationale de textile dont les capitaux ont été ouverts à 65% à des intérêts indiens.
Si les propos du chef de l’Etat peuvent avoir un fondement juridique dans le cadre de l’accord mulifibres conclut par les Etat au niveau de l’Organisation mondiale du commerce (Omc) en matière de textile, ils font sourire l’humble intellectuel de Sarh qui sait que jamais, en 30 ans, celui qui est désormais Maréchal du Tchad n’a réussi à protéger l’économie nationale, moins encore cette unité économique en charge de la transformation du coton tchadien qui a connu au moins quatre restructurations passant du statut public au privé sans jamais parvenir à décoller. Le problème, tout le monde le sait, est que le pouvoir, en plus d’être prédateur, n’est pas capable de faire face à la fraude qui a lentement mais surement réussit à mettre à genoux la compagnie sucrière du Tchad, l’autre unité industrielle de la ville de Sarh.
Pour des observateurs avertis, la nouvelle société nationale de textiles, bien que faisant la fierté de tout patriote, fait face au grand défi qui reste celui de la compétitivité, elle-même conditionnée par le coût de production dont l’élément phare est l’électricité. Autre défi et non des moindre est sa capacité à pouvoir couvrir l’ensemble du territoire national alors que son futur fournisseur, la Cotontchad SN n’annonce que 175 000 tonnes pour la campagne 2020.
C’est dire qu’en annonçant tout de go l’interdiction de l’importation des tissus, le chef de l’Etat ouvre la voie à une pagaille comme savent le semer les forces de l’ordre et autres douaniers pour qui, la discipline ou simplement la vertu ne sont pas la chose la mieux partagée.
L’économie d’une nation, c’est de la prospective et de la discipline adossée à une éthique soucieuse de la fortune publique. Chose qui n’est assurément pas le cas. En témoigne la sortie du chef de l’Etat qui d’ailleurs ne donne pas, en la matière de bons exemples. En parachutant ses rejetons à la tête de deux unités industrielles (Cotontchad et Sonacim), le Maréchal montre que son souci est tout, sauf la recherche de la prospérité économique du pays. En passant, quels sont les états financiers de la cimenterie de Baoré, à l’arrêt depuis des lustres et dont on a annoncé la reprise grâce à l’argent public ?
La Rédaction