Edito

Edito N°018

Une justice à réinventer

L’appareil judiciaire tchadien va mal. Il fait l’objet d’injonctions et de pressions venues de toute part. Ce qui a compromis son indépendance et son impartialité. Des procédures judiciaires déclenchées  sont souvent compromises  par des individus dits « intouchables ». Et les obstructions à l’action de la justice sont légions. L’exemple le plus patent, est l’évasion des présumés violeurs de Zouhoura de la prison d’Amsinéné le lundi 20 juin dernier. Une évasion rocambolesque et dont les acteurs sont, selon de bonnes sources connus.

 Pourtant cette prison, un lieu stratégique est bien gardé par des gendarmes et des agents de la garde nationale et nomade qui font office d’agents pénitentiaires. Cette évasion met ainsi en lumière la faiblesse de la direction pénitentiaire et partant de la justice tchadienne dans son ensemble. Cet évènement rappelle également le scandale du Commissariat du 3ème arrondissement de la ville de N’Djaména en  2013, lorsque des individus armés jusqu’aux dents ont extrait de force un meurtrier gardé à vue pour l’abattre comme au temps du talion. Ce genre de faits n’émeut plus l’opinion tchadienne, tellement les citoyens sont habitués à voir  des délinquants disparaître dans la nature avec la complicité même de ceux qui sont censés les garder.

Lors d’une information judiciaire, la coopération est une obligation pour tout citoyen. Malheureusement, certains individus qui se réclament de la haute classe, bafouent ce principe. Certains délinquants sont protégés par des hauts gradés des services de sécurité rendant la procédure judiciaire périlleuse. D’autres défient la justice en refusant de mettre les présumés délinquants à la disposition du juge. Or, le principe aurait voulu que quel que soit le statut  de la personne, tout homme faisant l’objet de poursuites judiciaires doit répondre de ses actes devant le juge. Mais au Tchad, certaines personnes se croient au-dessus de la loi. Et ces comportements méprisants à l’égard du droit et de la justice sont entretenus au plus haut niveau des sphères de la République. Le refus de l’ex-directeur de la douane Salaye Déby de répondre à la convocation du Tribunal de Grande Instance de N’Djamena en est un exemple.

La corruption, la nomination des juges non compétents sur des critères subjectifs et l’ingérence de l’exécutif dans le cours des procédures, les règlements de compte, les vendettas sont ainsi des comportements qui compromettent considérablement la crédibilité de notre justice. Or la justice est le socle de la paix sociale. Plus de douze ans après les états généraux de la justice et après deux programmes aussi dispendieux que le Prajust, on est encore loin de sortir de l’auberge. 

La Rédaction