A la recherche du Tchadien idéal
La question aurait pu figurer en bonne place chaque deuxième semaine du mois d’août qui marque l’accession de notre pays à la souveraineté internationale. Mais comme la redevabilité et le souci de performance ne sont pas les valeurs les plus partagées, on se contentera de disserter sur les faits qui sont l’objet de travail de l’observateur.
Les faits étant têtus, rien que la semaine qui s’achève, avec une petite extension sur l’autre ont donné à voir des spectacles des plus désolants. Deux milles agents de la police n’ont pu justifier du salaire qu’ils touchent depuis des années et en ont été empêchés de fait par la mission de l’inspection générale d’état. Pendant ce temps, un ministre de la République, alerté sur une prétendue imitation de sa signature fait bloquer in extremis, une transaction qui aurait pu lui être attribuée et se porte en personne à la police judiciaire pour s’en expliquer. Quelques jours plus tard, c’est toute l’administration publique qui est en émoi à l’annonce de la publication prochaine des résultats de l’audit des diplômes des agents embauchés ou reclassés à la fonction publique ces 20 dernières années. Les fuites annoncent des surprises. De nombreux hauts cadres auraient fait carrière avec de faux parchemins.
Malgré un tel tableau, le chef de l’Etat annonce la mise en place d’ici la fin de l’année de toutes les institutions de la nouvelle République en «quête de meilleures perspectives» avec des «institutions fortes». De quoi sourire quand on sait que la nouvelle République avec la présidence intégrale n’aura de fort que le seul exécutif. Une institution forte est faite de femmes et d’hommes convaincus de leur engagement au service de la République. Ce genre d’hommes sont capables face à la menace et à la contrainte de dire non et de résister au nom de l’intérêt supérieur de la nation. Or des hommes de cette race, on en compte de moins en moins. C’est cette absence d’opiniâtreté qui a fait le lit à la corruption et à l’injustice qui caractérisent aujourd’hui l’administration tchadienne.
Depuis ces 20 dernières années, la figure de réussite pour le Tchadien n’est ni le meilleur scientifique, ni le meilleur sportif (si tant est qu’il existe une volonté de développer le sport). A contrario on a vu prospérer des fripouilles dont la seule référence est la proximité avec les cercles du pouvoir politique. Aujourd’hui dans le cercle des jeunes, ce sont de tels trajectoires qui inspirent. Comment prétendre donc promouvoir un ordre nouveau avec des aspirations telles qu’énoncées par le chef de l’Etat qui lui-même semble avoir rendu les armes en matière de lutte contre la prévarication des deniers publics ? Le Tchadien idéal, celui qui croit aux valeurs républicaines, du mérite, de l’égalité des chances et de la justice reste à créer. Assurément pas avec la 4ème République.
La Redaction