Edito

Edito N°083

Edito N°083 1

La fin du travel ban ne changera rien en vérité

Chérif Mahamat Zène, ministre des affaires étrangères et de l’intégration africaine et de la coopération internationale a utilisé tweeter pour s’en réjouir. Dans la nuit du 10 au 11 avril 2018, le président américain Donald Trump a levé l’interdiction de voyager qui frappe une catégorie de Tchadiens depuis le dernier trimestre de l’année 2017.

Une décision causée selon les américains par «des lacunes dans les pratiques du gouvernement tchadien en matière de gestion de l’identité et de partage d’information». La décision a largement entamé la réputation du pays dont les ressortissants ne sont, du reste, pas de grands voyageurs en direction des Etats-Unis. Mais pendant ce temps, le pays a largement bénéficié de la mauvaise publicité renforcée par une vrai-fausse histoire d’immatriculation d’un Airbus au Tchad et que les services américains ont retrouvé en Syrie transportant des produits ‘’prohibés’’.

L’avalanche de mauvaises nouvelles avait, en son temps fait réagir le pouvoir qui n’a pas hésité à aller jusqu’à brûler la bannière étoilée à travers une certaine société civile… Un acte inamical que l’on semble avoir oublié mais qui reste dans la mémoire des nations organisées et qui travaillent et se construisent sur du long terme.

L’organisation et la perspective, c’est ce qui manque cruellement à notre système qui ne se lasse pas de faux semblants répétant à l’envie des slogans dont on se demande s’il a pris le soin de le méditer lui-même.

Quoi qu’on ne dise, le travel ban est la conséquence d’un clientélisme et d’une gestion tribale du système de délivrance de pièces d’identités. Dieu sait aujourd’hui le nombre de Darfouris, Kanouri et autres étrangers qui ont pu s’installer en Europe ou aux Etats-Unis grâce à un passeport Tchadien obtenu moyennant quelque chose ou simplement parce qu’une connaissance, un parent a voulu ‘’aider’’.

La pratique n’est pas nouvelle. Elle n’est pas non plus cantonnée au seul service de délivrance des documents d’identité dont la gestion a été plus que décriée. Il concerne toute l’administration publique où le clientélisme et le népotisme se sont insidieusement imposés pour finir par faire partie des habitudes. Dire de la gouvernance du Tchad qu’elle est marquée par la corruption est un euphémisme…

Et c’est dans ce contexte que le pouvoir ressert le plat de la vertu et de la probité comme valeurs cardinales pour la IVème République en érection. Une proclamation qui fait sourire quiconque à une petite idée du système et la façon dont les choses se passent. Combattre la corruption et promouvoir les valeurs reviendra à provoquer un grand chambardement au sein d’un système qui s’est bâti et consolidé par la négation de l’excellence et du travail bien fait. Un proverbe dit qu’à vouloir castrer un vieux bouc, on le tue. Prétendre remanier un système vieux de près de trente ans avec les mêmes acteurs, c’est tenter de persuader que le père Noël existe.

La Rédaction