Réunis en plénière du 3 au 13 décembre 2024, les évêques du Tchad ont rendu public leur traditionnel message de noël. Après avoir constaté le non-respect de la vie humaine, ils rappellent au gouvernement la sacralité de celle-ci et appellent les autorités au respect des libertés fondamentales.
Pour les évêques, la vie humaine est sacrée. Oter la vie à un être humain, de quelque manière que ce soit, est un crime. « Les massacres des personnes continuent sous le regard silencieux et complice de certaines autorités. On dirait qu’au Tchad, tuer est devenu banal et permis pour certaines personnes. Comment comprendre autrement les conflits meurtriers intercommunautaires, en particulier entre éleveurs et agriculteurs, les tueries et les assassinats ci et là, les règlements de compte, les braquages à main armée, les enlèvements de personnes contre rançon. Etc. ? En plus de tout cela, le manque d’accès à la justice équitable pour tous crée des sentiments de frustration, de haine et de vengeance », déplorent-ils. Ils ajoutent que la violation de certains droits humains porte atteinte à la dignité de la vie humaine. « Parmi ceux-ci, nous voulons souligner le droit à une alimentation suffisante et au moyen de se la procurer, le droit à la santé qui couvre la possibilité d’accès à l’eau potable et aux soins appropriés, au travail digne pour tous et à une éducation de qualité, à la liberté et à la sécurité des personnes et des biens ».
L’église catholique au Tchad constate que les menaces, les intimidations, les violences, les mensonges et les fausses promesses sont la règle en politique. « On se souviendra que ces pratiques visent à amener les gens à développer le sentiment d’abandon. A perdre confiance en eux-mêmes et en tous, à ne plus croire en rien et à être manipulables à volonté. Le climat de méfiance et de suspicion qui domine dans les populations autour des élections en sont la conséquence », constatent les évêques. Ils poursuivent que le fossé entre la minorité riche et la majorité pauvre se creuse davantage au Tchad. « Alors que les autorités sont censées œuvrer pour la justice afin de réduire la misère, nous déplorons qu’elles soient indifférentes au détournement de fonds publics, à l’augmentation exorbitante du prix des produits de première nécessité et aux spéculations sur le prix du carburant. Ce mépris à l’égard des autres est source de malheur », ajoutent-ils.
« Ce que nous proposons : le respect de la dignité humaine »
Les évêques rappellent aux Gouvernants que leur rôle est de veiller au respect des droits humains et des libertés fondamentales contenus dans la Constitution du Tchad. « Soyez les garants du respect de la vie de la personne dans sa dignité et assumez votre rôle avec responsabilité et conscience afin de promouvoir l’épanouissement des concitoyens et l’accès au bien commun pour tous ».
Aux autorités judiciaires, ils rappellent que le respect de la personne humaine nécessite l’accès à la justice pour tous. « Il vous revient de le garantir et de dire le droit. Appliquez la justice de manière équitable à tous les citoyens, indépendamment de leur appartenance sociale, ethnique, culturelle et religieuse. Car, « nul n’est au-dessus de la loi » », plaident les évêques.
Aux acteurs politiques : « Nous vous rappelons que la course au pouvoir ne doit pas se faire au détriment des valeurs telles que la vérité, l’honnêteté, l’égalité, la justice, la liberté et la paix. Respectez le code de conduite dans l’action politique », rappellent-ils.
Aux forces de défense et de sécurité, les évêques leurs demandent d’agir avec loyauté afin de restaurer la confiance de la population à votre égard. « Que votre mission ne soit jamais perçue comme celle de ceux qui massacrent, oppriment, torturent, intimident et sèment la panique. Nous vous demandons d’assumer cette tâche avec conscience afin que chaque Tchadien se sente protégé ».
À la communauté internationale, les évêques apprécient leur en faveur de la défense des droits des personnes lorsqu’ils sont bafoués au Tchad. « Cependant, nous déplorons un certain manque de fermeté et de convergence dans les prises de position face à certaines dérives politiques, notamment lors des convocations électorales », déplorent les Clergés.
Aux jeunes, les évêques trouvent qu’il y a des obstacles qui les découragent et ne les donnent plus envie de construire leur vie. « Certains obstacles sont externes : le manque de moyens, une maladie inattendue, le poids de la tradition, les sollicitations de la vie moderne, l’éducation qui ne répond pas aux défis actuels, l’exclusion du marché de travail, le chômage, l’exploitation et les abus en tout genre, etc. Certains obstacles sont internes : l’esclavage de l’alcool ou de la drogue, la paresse, le gain facile, l’imitation (« tout le monde fait comme ça »), le vagabondage sexuel, la peur, la résignation, etc. », égrainent-ils. « Nous vous encourageons à être audacieux devant les défis qui sont les vôtres pour défendre votre dignité et assurer un avenir meilleur aux générations futures », encouragent les évêques.