A l’approche de l’élection présidentielle du 6 mai, la Fédération internationale pour les droits humains (Fidh), la Ligue tchadienne des droits de l’Homme (Ltdh) et l’Association Tchadienne pour la promotion des droits humains (Atpdh) se préoccupent dans un communiqué de presse, de la situation des droits humains et la crédibilité du scrutin. Elles demandent le déploiement d’observateurs internationaux pour veiller au bon déroulement de l’élection en vue de prémunir le Tchad d’une crise post-électorale.
Pour ces trois associations de défense de droits de l’Homme, l’élection présidentielle du 6 mai 2024 se tiendra dans un contexte délétère marqué par la méfiance dans les institutions électorales et la multiplication des violations des droits humains y compris la répression violente des manifestations pacifiques, les attaques sur les défenseurs et le règne de l’impunité. « La mort de l’opposant Yaya Dillo dans les circonstances non encore élucidées malgré la promesse d’enquête internationale du Premier ministre, a davantage renforcé la crise de confiance », soulignent-elles.
Selon le communiqué, depuis plusieurs années, la Fidh alerte sur le musellement des voix en faveur d’une démocratique véritable au Tchad, caractéristique des régimes successifs depuis plus de trente ans. « A cela s’ajoutent les irrégularités fréquemment constatées lors des processus électoraux dont certaines déjà signalées pendant la période pré-électorale », informent les organisations qui s’inquiètent d’une élection qui « semble ni crédible, ni libre, ni démocratique ».
D’après les signataires de ce communiqué, les réformes institutionnelles et électorales réalisées par le gouvernement tchadien n’ont pas été inclusives et n’ont pas permis de mettre en place des institutions consensuelles. « Depuis le référendum constitutionnel du 17 décembre 2023 qui a renforcé les pouvoirs du Président de la République, les autorités tchadiennes ont créé des institutions en nommant à leurs têtes des personnalités proches du Mouvement patriotique du salut (Mps), parti du régime au pouvoir. Les 29 et 30 janvier dernier, le président de la transition, Mahamat Idriss Déby, a signé trois décrets portant nominations des membres du Conseil constitutionnel et de l’Agence nationale de gestion des élections (Ange). L’Agence nationale de gestion des élections (Ange) est également dominée par la coalition autour du Mps », constatent la Fidh, la Ltdh et l’Atpdh. Selon elles, pour favoriser la confiance dans les processus électoraux, il est indispensable d’avoir des organes électoraux indépendants, impartiaux. «La mise en place du conseil constitutionnel et de l’Ange, institutions électorales majeures, a été critiquée par les acteurs de la société civile et l’opposition. Il appartient à ces institutions de faire preuve de transparence et d’intégrité à l’effet de crédibiliser les résultats qui seront proclamés à l’issue du scrutin présidentiel», déclare Me Drissa Traoré, secrétaire général de la Fidh, rapporte le communiqué. «Nous exhortons la communauté internationale à mettre fin à l’exception tchadienne en veillant objectivement à la régularité du vote, le cas échéant, en mettant en place si possible un système de certification des élections du scrutin en vue de prémunir le Tchad d’une crise postélectorale », exhorte Me Drissa Traoré.
Les trois organisations exigent que la surveillance de l’élection par des observateurs nationaux et internationaux soit garantie par l’Etat tchadien. «Pour favoriser la transparence du scrutin, il est indispensable de permettre, sans aucune entrave, aux observateurs de la société civile nationale et aux observateurs internationaux d’observer toutes les phases du processus électoral de l’élection présidentielle et dans toutes les circonscriptions électorales et centres de vote y compris les casernes militaires et les zones nomades. Pour cela, Ange devra alléger davantage la procédure d’obtention des accréditations et d’éviter toute discrimination de quelle que nature que ce soit dans l’attribution », déclare Mme Agnès Ildijma Lokiam, présidente de l’Atpdh. « Nous invitons également tous les candidats à respecter les résultats des urnes, à s’abstenir de toute forme de violence et le cas échéant, à recourir aux voies de recours légales pour toute contestation des résultats, tel que prévu dans le code de bonne conduite à laquelle tous les candidats ont souscrit. Dans cette optique, nous exhortons fortement le Conseil constitutionnel à faire preuve d’impartialité dans la gestion du contentieux. », complète Me Adoum Mahamat Boukar, président de la Ltdh.
Nadjita Namlengar