Ville agricole jadis débordante d’activités, notamment grâce à l’Office de mise en valeur Satégui Derassia (Omvsd), Laï est devenue difficile à vivre, obligeant les jeunes à s’orienter vers de nouvelles activités. Le ramassage de graviers au fond du Logone en est une.
Il est environ 7h ce jeudi, Kitagoto et ses compagnons débarquement chez ‘’Taying », le dernier cabaret de cochette (boisson locale à base du riz) que l’on trouve au quartier Yila avant de descendre au bord du fleuve. Apres deux calebasses chacun, les compères arrivent avec leurs équipements (un petit filet conique bordé d’un cercle en fer, une perche, une pagaie, des pelles). Après avoir déposé le tout dans la pirogue faite de tôle et de planches, ils naviguent vers le milieu du fleuve, prenant le soin d’éviter les hippopotames visibles à distance. Au large, ils se mettent à l’ouvrage. Ils plongent à tour de rôle au fond avec le filet pour charger le gravier. Par les interstices, le sable se dégage, laissant que du gravier dans le panier. Ils le remontent et l’entassent dans la pirogue. Une fois la pirogue chargée, ils refont le chemin inverse pour déposer le gravier à la berge avant de repartir pour un autre ramassage.
« A quatre, nous faisons 5 à 6 pirogues par jour. Il faut 5 jours pour ramasser l’équivalent d’une benne. Mais si l’ouvrier est seul, il peut ramasser jusqu’à 3 Pirogue par jour et il lui faut environ 10 jours pour faire la benne », explique Libgué Jude, la quarantaine, un ancien pécheur qui à cause de la rareté des poissons dans le Logone, a préféré se reconvertir en ramasseur de graviers.
Pour travailler, ces ouvriers louent la pirogue à 500f. « Et si le grossiste possède une pirogue, nous ramassons un voyage à 1500f sinon c’est 2000f le voyage de graviers », rapporte Tchanandé un jeune qui a abandonné l’école pour se consacrer à cette activité.
Une fois le volume atteint, le gravier est revendu 80 000 Fcfa aux commerçants qui le revendent à leur tour au entreprises de construction dont celle des chinois qui construisent la route Djoumane -Laï.
Dans la zone, les chantiers se font essentiellement avec du gravier issu du fleuve. Ce qui fait que la demande est constante. Cependant, l’activité comporte des risques. Chaque jours, ces ‘’pêcheurs’’ d’un autre genre, doivent esquiver les hippopotames nombreux au fleuve en cette période (au risque de se faire attaquer) pour aller travailler. Aussi, ayant pris goût à l’argent, certains jeunes délaissent complètement l’école au détriment du travail de gravier. Pire, une fois payés, d’autres consacrent presqu’exclusivement leur gains à l’alcool. Outre la cochette, ils boivent de plus en plus le argui et les alcools de synthèse dont le fameux ‘’Nguerek’’ ce qui les affaibli et transforme bon nombre d’entre eux en alcooliques dont le quotidien se résume « à aller travailler pour venir boire », déplore Marcel K., un enseignant.
Abgué Boukar Christophe à Laï