Capitaliser le succès du PND
Les lampions se sont éteints sur la table-ronde de Paris pour le financement du Plan national de développement (Pnd) avec le succès que l’on connait. Très vite, le forum sur les investissements d’Abu Dabi devrait aussi passer pour nous rappeler à la réalité, ou plutôt nous faire redescendre sur terre après quelques jours d’euphorie dans une bulle médiatique bercée par des promesses de plus de 10 000 milliards de FCFA.
La dure réalité à laquelle le pays doit faire face est qu’en deux années, le système éducatif a formé deux générations de bacheliers sans leur ouvrir les portes de l’Université qui n’a toujours pas terminé l’année scolaire 2015-2016 !
La dure réalité des enseignants du supérieur qui ont déposé la craie et menacent de bloquer une rentrée académique, véritable cosmétique, d’un système universitaire au plus mal.
La dure réalité est aussi celle d’un pays avec un système politique bloqué qui s’apprête à organiser un forum devant déboucher sur une modification de la constitution. Un processus présenté comme inclusif mais qui est dénoncé par de nombreux acteurs qui rappellent que l’urgence n’est pas la réforme des institutions. L’urgence, rappelle cette frange de l’opposition qui a été relayée lundi par le ministère français des affaires étrangères, c’est le bon fonctionnement du cycle démocratique, en l’occurrence l’organisation des élections législatives. Une perspective rejetée par le gouvernement pour manque de ressources. Mais pour beaucoup d’observateurs, la décision n’est pas étrangère aux résultats de la présidentielle qui ont sérieusement mis en difficulté le parti au pouvoir.
Ce sont donc à ces dures réalités que nous devons revenir et ce faisant, la France qui a accueilli et soutenu la collecte de fonds pour le financement du Plan national de développement semble donner écho aux revendications de la contestation. Le système politique est en panne, il faut une ouverture, sinon redonner de la légitimité au parlement qui n’a d’ailleurs brillé que par son incapacité à réguler le jeu démocratique.
Tel un arbitre qui remet un ballon en chandelle, la France rebat les cartes du jeu politique avec deux options pour le gouvernement. Accepter l’ouverture et laisser tomber la marche forcée vers la modification de la constitution à travers le forum pour la réforme des institutions pour consacrer à nouveau la présidence à vie ou fermer la porte au dialogue et risquer la lutte armée avec le risque de ne pas engranger les dividendes du succès de Paris.
C’est à notre sens, le message que tentent de nous faire passer nos partenaires français. A condition que l’opposition et la société civile, prompts à la contestation, se donnent aussi les moyens de capitaliser ce coup de pouce de Paris qu’ils ont souvent brocardé pour son soutien inconditionnel au nom de la lutte contre le terrorisme.
En fin de compte, c’est une invitation à fructifier les dividendes du succès de la table-ronde de Paris qui est adressé aux enfants du Tchad. Libre à eux de choisir le côté de l’histoire dans lequel ils voudront s’inscrire.