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Me Midaye Guerimbaye : « la racine de l’Etat est en train d’être démantelée au Tchad »

Me Midaye Guerimbaye : « la racine de l’Etat est en train d’être démantelée au Tchad » 1

Au cours d’un échange avec les journalistes ce vendredi soir à la Radio Fm Liberté, le président de la Ligue tchadienne des droits de l’homme (Ltdh) Me Midaye Guerimbaye n’est pas passé par le dos de la cuillère pour fustiger la gestion du Tchad et appelle les Tchadiens à faire bloc à toutes les formes d’exclusions.

Le président de la ligue tchadienne des droits de l’homme (Ltdh), Me Midaye Guerimbaye a dressé un tableau sombre de la justice tchadienne. Selon le défenseur des droits humains, le  pouvoir exécutif est infantilisé, le législatif n’est législatif que de nom et le judiciaire a démissionné. « Ce qui reste aux tchadiens, c’est de rester debout et de défendre notre terre avec nos convictions, différences et nos appartenances », lance le président de la Ltdh pour qui, les hommes politiques tchadiens n’aiment pas leur pays. « Il ne faut jamais qu’on permette à ceux qui nous ont amenés à nous entretuer, que nous soyons musulmans ou chrétiens, il y a 20, 30 à 40 ans, de refaire les mêmes erreurs. Nous devons dire non à la discrimination, au régionalisme et au confessionnalisme. Ceux qui ont la responsabilité de scolariser les enfants font actuellement black-out sur la formation », dénonce Me Guerimbaye qui appelle les Tchadiens à l’unité.

« Dans une vie de société, la paix, la quiétude et le développement sont réglementés par un service, chargé de distribuer la justice. Mais chez nous, la justice a démissionné. Au-delà de la corruption que nous dénonçons tous, nous avons de grands problèmes. Le législateur a autorisé au ministre de la justice d’intervenir dans le cours de la justice lorsque toutes les voies de recours sont terminées. En principe, lorsque deux personnes en procès épuisent toutes les procédures et que la décision définitive est contraire à la loi, le ministre fait la dénonciation à la cour. Cette dernière reprend le dossier. La décision rendue a de l’effet par rapport à la loi. Cette dernière décision à la demande du ministre n’est valable qu’à la loi mais les parties qui ont épuisé la procédure ne sont plus concernées, car la première décision s’impose à elles. Malheureusement aujourd’hui, cette loi qui vise à obliger le juge à rester dans la logique du droit est utilisé pour régler des comptes. En tant qu’avocat, je vous assure qu’aucune décision de justice n’est définitive au Tchad, car à tout moment, le ministre de la justice peut intervenir pour faire basculer les choses dans l’un ou l’autre camp. Ce qui est véritablement dangereux »

Le sursis à exécution, l’autre nœud gordien dans la procédure judiciaire au Tchad

D’après le président de la Ligue tchadienne des droits de l’homme, la cour suprême tchadienne rend une dizaine de décisions sur la base du sursis à exécution (Ndlr : mesure provisoire de la cour pour permettre à ce que la décision ne soit pas exécutée, en attendant que la décision de fond ne soit vidée). Mais le hic, relève Me Midaye Guerimbaye, cette cour n’a jamais justifié ses décisions. « Le juge dit qu’il rejette ou ordonne mais il n’a jamais motivé. Ce qui pose un grave problème de droit », regrette le président de la Ltdh qui martèle que la justice n’est valable que dans une partie du pays. « L’autre partie du Tchad est cédée aux chefs coutumiers, traditionnels et militaires. Dans certaines zones, le magistrat peut être contraint par des hommes armés qui vont exiger que sa décision ne soit exécutée», déplore-t-il. 

Derrière les noms éleveurs/agriculteurs, se cachent d’autres considérations

Pour le président de la Ltdh, une autre interprétation se fait derrière les mots éleveurs/agriculteurs. Il note que certains Tchadiens sont sciemment montés contre d’autres. « On fait comprendre à certains qu’ils sont supérieurs à d’autres. Nous gérons des conflits éleveurs/agriculteurs mais il faut aider les Tchadiens à s’accepter, car derrière le mot éleveur, se cachent d’autres considérations et derrière le mot agriculteur se cachent d’autres jugements », note le président de la Ltdh.

Mahamat Nour Ibédou, prisonnier politique

L’affaire Mahamat Nour Ibédou est selon le président de la Ltdh purement politique. « Aujourd’hui, une grande partie du Tchad n’a pas droit au débat politique. Mahamat Nour Ibédou est la personne qui a accès à l’information intégrale sur le nord du Tchad  et puisse qu’il a l’information sur ce qui se passe dans les coins et recoins du nord, il les met sur la place publique et cela  fait mal aux autres », « Et si on arrive à le faire taire, cela sera grave. C’est un homme qui a accepté de sacrifier sa vie pour une grande partie de notre pays », Conclut-il.

Stanyslas Asnan