Les journalistes tchadiens ont rendu leurs adieux à leur consœur de la radio Fm Liberté Kadja Kana Grâce Boura qui a tiré sa révérence à fleur d’âge à 27 ans le 18 décembre dernier.
Ils étaient plusieurs dizaine de journalistes de divers médias tchadiens à se réunir dès 7 heures à la radio Fm Liberté pour leurs adieux à Kadja Kana Grâce Boura. Visages fermés, l’œil embués de larmes, la plupart était ébranlés à la disparition de celle qui est appelée affectueusement par les auditeurs de la radio et par ses confrères KKGB.
Après plus d’une d’attente et de concertation à la radio, cap sur l’Hôpital général de référence nationale (Hgrn). Sur place, confrères/consœurs de la défunte, ses parents, amis ont eu droit à une visite du corps. « Pas elle !!! Dites-moi que je rêve ! Oh Dieu, pourquoi cela », lance l’une des amies de la défunte qui est inconsolable.
De la morgue, le corps sans vie de KKGB est ramené à la radio Fm Liberté où le personnel de la radio, les auditeurs et surtout, les victimes du régime Hissein Habré lui ont rendu leurs derniers hommages. « Tu étais notre voix Grâce. Tu ne pourras plus jamais porter haut notre voix. Nous ne pourrons plus suivre tes reportages ma fille », lance l’une des victimes de HH. Pour rappel, le dernier reportage de Kadja Kana Grâce remonte à la marche pacifique de ces victimes pour réclamer leurs indemnisations.
Après cet ultime recueillement à la radio, direction le domicile familial au quartier Toukra, dans le 9ème arrondissement de N’Djaména où des témoignages ont été rendus. Au nom des journalistes et de ses condisciples de l’Institut national des Sciences et techniques d’Abéché (Insta), une minute de silence a été observée à la mémoire de défunte. Kodmadjingar André retient de la défunte une étudiante, calme, souriante et travailleuse. « Durant les trois années d’études dont j’ai été délégué pendant deux ans, aucun étudiant ne s’est plaint du comportement de Grâce. L’administration ne m’a jamais interpellé à son sujet », renchérit André qui assure que Grâce est considérée par ses confrères de la radio comme un homme. « Nous avons réalisé plusieurs reportages avec KKGB mais j’en retiens deux. Le premier porte sur l’éducation des enfants des nomades de Toukra. Un reportage qui a eu l’écho et un établissement a accepté de prendre en charge gratuitement une fille de 12 ans dont la défunte a dressé le portrait. Le second porte sur la marche pacifique des victimes de HH, réprimée par la police. Sous les crépitement des gaz lacrymogènes, elle entrait partout pour chercher des informations», ajoute-t-il.
Celle qui souhaitait se spécialiser dans le domaine de l’éducation sera fauchée par la mort le 18 décembre dernier à l’âge de 27 ans.
En moins de cinq ans d’expérience, KKGB a remporté deux prix d’excellence, le prix Unicef en 2017 sur le thème « pour un chaque enfant, une éducation de qualité, et le prix Oxfam sur les conditions socioéconomiques de la population de Ngouboua dans la province du Lac en 2018. « Chaque matin lorsque nous tenons nos conférences de rédaction, Kadja était comme une bonne guerrière qui affuta toujours ses sagaies, prête à aller chercher de l’information, même dans les coins les plus dangereux. Elle alla loin de sa famille, dans les îles du Lac-Tchad pour ramener des informations incontestables », se souvient Allaïssem Ange, coordinateur de la radio Fm Liberté.
Ses parents retiennent d’elle un rempart de la famille, qui ne fait que surprendre dès le bas-âge.
Stanyslas Asnan