Ainsi donc, cela fait 10 ans que musulmans, protestants et catholiques du Tchad communient à chaque fin du mois de novembre pour invoquer la paix sur la nation tchadienne sans que cela ne se traduise dans la réalité des citoyens de ce pays. Cette année, l’évènement a été décalé de quelques jours et a coïncidé avec la révélation des affaires de détournements et autres actes non vertueux qui font les choux gras de la presse ces jours-ci.
Le chef de l’Etat lui s’est fendu de louage envers les religieux qui partagent selon lui, la paternité du calme relatif que vit le pays dans une sous-région tourmentée. Des paroles mielleuses qui laisseraient penser qu’entre Déby et le clergé surtout chrétien avec qui il s’est brouillé au sujet du serment confessionnel, c’est désormais le parfait amour.
Mais à notre avis, la prière du 2 décembre dernier n’est rien d’autre qu’un bal d’hypocrisie qui n’a de religieux que les apparences. Au-delà des intercessions et du subtil rappel aux fondamentaux pour une société de justice et de paix par l’archevêque métropolitain de N’Djaména, l’essentiel de la cérémonie n’est rien d’autre qu’une opération de marketing politique dont le seul et véritable bénéficiaire reste Idriss Déby Itno.
Le Tchad est-il en paix ? Pas sûr. Il vit et respire comme le dit le chef de l’Etat une absence de conflit ouvert. Et ce n’est pas la définition de la paix qui est caractérisée par le vivre ensemble et une vie harmonieuse basée sur le respect mutuel. Or, par sa gouvernance, Idriss Déby a instauré une sorte d’hiérarchisation de la société où le pauvre git au bas de l’échelle servant de marche pied au riche. Ceci, parce que la balance qui maintient sinon équilibre les relations entre l’humble berger et le militaire au port altier, nous voulons parler de la justice, est déséquilibrée.
Bien que nous réclamant à 98% des deux religions révélées, nous n’avons aucune capacité d’indignation face à l’injustice. Sinon comment comprendre que dans un pays avec autant de croyants, plus personne ne croit en la justice ? Comment comprendre que dans un pays comme le notre, les affaires de détournement sont légions et utilisées de manière retords pour régler des problèmes politiques et non pour établir voire restaurer la justice.
Pour l’auteur de ces lignes qui confesse la foi chrétienne, il est temps pour nous de nous rappeler cette interpellation «lorsque les fondements de la nation sont ébranlés, que fera le juste ?». Aller prier et applaudir ceux par la faute desquels des dizaines d’enfants meurent chaque semaine faute de soins ? Communier comme si de rien n’était avec eux sans leur rappeler qu’à cause d’eux, des hommes s’étripent dans les campagnes au nom d’un Dieu qui invite plutôt à l’amour du prochain ?
Au regard de l’état de la nation, il faudra un peu plus pour que nous ayons au moins l’air, puisque la foi est une affaire personnelle, d’être des descendants d’Abraham dans ce territoire.
La Rédaction