Par un long communiqué du 28 octobre 2024, le Ministère des finances, du budget et de l’économie, Tahir Hamid Nguilin informe l’opinion nationale et internationale de la note « B-/B » attribuée par Standard & Poor’s (S&P) au Tchad. Une notation « inaugurale » qui contribuera à la « mobilisation des ressources nécessaires » pour financer le futur plan de développement.
Les agences de notation financière comme S&P mesurent le risque de non remboursement des dettes des emprunteurs. La note « B-/B » indique un niveau très spéculatif et vulnérable de la dette, ne présentant pas de caractéristiques d’investissements souhaitables. Y a-t-il vraiment de quoi se glorifier ? Était-il nécessaire de courir demander une note à S&P pour juste se vanter d’avoir la première note inaugurale ? A combien monte la rémunération de cette notation? Cela ressemble à ce qu’on appelle un « rating shoping » inutile car on a pas besoin de cet exercice pour savoir que nous ne pouvons pas aller sur le marché mobiliser les ressources. C’est encore une fois de plus un bluff dont le Ministre des finances est maître, et dont la capacité de manipuler son frère de Président de la République n’a d’égal que l’ignorance de ce dernier.
Notre dette élevée nous a obligés à négocier son rééchelonnement, il n’y a pas de quoi en être fier. La dette intérieure est un poids qui menace les entreprises. Le Tchad est difficilement solvable sur le marché du franc CFA où ses émissions d’obligations reçoivent très peu de soutien. Il a des arriérés dans les institutions financières régionales. En réalité on ne connaît pas le niveau réel de la dette du Tchad.
Ce qui surprend ici, ce sont les arguments utilisés par S&P dans sa notation rendue publique le 28 octobre 2024. S&P salue la stabilité découlant des élections qui ont permis au fils du Président défunt d’être élu. Une curieuse évaluation d’un environnement économique plombé par des élections frauduleuses contestées qui ont généré une crise politique, dont l’impact négatif sur l’économie est déjà désastreux pour le pays.
Ils introduisent la notion d’une armée forte, soutenue par la France, pour parler de stabilité. Les élections législatives et locales catastrophiques à venir ne sont pas considérées, même les inondations ne sont pas mentionnées dans les risques politiques, économiques et sociaux immédiats du pays. S&P apparaît comme un instrument de propagande politique pour le régime. On sait que le ministre des Finances a multiplié les lobbys en utilisant des anciens fonctionnaires des institutions internationales, venus prendre leur part que les dirigeants tchadiens se partagent, et s’en servent pour corrompre qui ils veulent.
Nous invitions S&P à venir au Tchad faire une vraie évaluation avec des équipes intègres et sérieuses. De quel soutien solide des partenaires internationaux parle-t-on quand on sait que le Tchad n’arrive toujours pas à conclure avec le FMI un programme ? Il y a un évident problème de crédibilité en voulant occulter cet indicateur important et à soutenir les yeux fermés que les réformes économiques attendues sont satisfaisantes. La complaisance n’aiderait pas le Tchad. Il faut s’assurer de la qualité de l’information et de sa fiabilité. On ne doit pas oublier la grave crise de la Grèce.
Dingam Teberô